Union européenne - Conférence de presse d’Emmanuel Macron, Président de la République, à l’occasion du Conseil européen extraordinaire du 1er février 2024 - Propos liminaire d’Emmanuel Macron
"Il était indispensable parce que notre soutien à l’Ukraine depuis le début de la guerre est uni et unanime. C’est dans cet esprit que nous avons abouti aujourd’hui."
Bruxelles, le 1er février 2024
=Seul le prononcé fait foi=
"Je suis heureux de vous retrouver à l’issue de ce Conseil européen extraordinaire important qui fait suite à celui de décembre dernier.
En décembre, nous avions réaffirmé la position qui est la nôtre depuis le début de la guerre : l’unité et le soutien très clair des Européens aux Ukrainiens. Cela s’était traduit par une décision sur l’ouverture des négociations d’adhésion pour l’Ukraine et la Moldavie, ce qui avait permis d’envoyer un signal politique clair sur notre communauté de destin avec ces pays.
L’accord que nous avons trouvé aujourd’hui permet de confirmer la clarté de ce choix. En effet, la question en suspens, vous vous en souvenez, concernait le volet économique et financier de notre soutien à l’Ukraine. Nous avions trouvé un accord à 26 sur la revue du cadre financier pluriannuel et la Hongrie n’avait pas pu accepter à ce moment-là cet accord. Depuis, nous avons travaillé pour permettre un accord à 27. Il était indispensable parce que notre soutien à l’Ukraine depuis le début de la guerre est uni et unanime. C’est dans cet esprit que nous avons abouti aujourd’hui.
Nous avons donc trouvé un accord à 27 qui nous permettra d’accorder 50 milliards d’euros pour la reconstruction et le soutien à l’Ukraine : 33 milliards de prêts, 17 milliards de dons et subventions, 9,6 milliards d’euros pour mettre en œuvre le Pacte Asile et Migration et agir conjointement avec les pays d’origine et de transit - et donc accompagner les décisions qui avaient été finalisées en fin d’année dernière - et 1,5 milliard d’euros pour le Fonds européen de défense au sein de la Facilité STEP, qui préfigure un instrument de souveraineté européenne. Cet accord nous permet donc d’agir jusqu’en 2027 et donne de la prévisibilité à notre soutien à l’Ukraine par un engagement économique et financier dans la durée. Le message est clair : la Russie ne peut pas compter sur une quelconque fatigue des Européens dans leur soutien à l’Ukraine.
Le Conseil européen est convenu que la Commission présentera un rapport annuel sur la mise en œuvre de la Facilité Ukraine. Sur cette base, nous tiendrons chaque année un débat pour fournir les orientations requises et, si nécessaire, le Conseil européen pourra, dans deux ans, inviter la Commission à présenter une proposition de revue de cette Facilité, dans le contexte en particulier du prochain cadre financier pluriannuel de l’Union européenne.
Le Conseil a également permis de faire un point sur notre soutien militaire à l’Ukraine. Nous prenons des engagements au niveau bilatéral. C’est l’un des objectifs de mon prochain déplacement en Ukraine. La France fournit, à ce titre -vous le savez - des capacités critiques qui peuvent faire la différence sur le champ de bataille : les missiles Scalp pour la défense aérienne, entre autres, des canons Caesar pour ce qui est de l’artillerie.
Et au-delà de ce soutien bilatéral, notre soutien doit se poursuivre à l’échelle européenne également. C’est là aussi une question de cohérence qui a été, ce matin, réaffirmée de manière très claire. Pour cela, nous devons nous doter d’instruments européens qui permettent de préserver la solidarité européenne et la pérennité de l’effort vis-à-vis de l’Ukraine. C’est le cas de la facilité européenne de paix que nous devons continuer à mobiliser et à faire évoluer vers une logique de production et d’acquisitions conjointes. Le représentant a fait des propositions utiles, qui ont été validées, qui vont nous permettre d’aboutir. Et, en février, la Commission reviendra sur la stratégie européenne en matière de défense et le programme d’investissements associés.
Au-delà de cela, nous avons souhaité avancer sur les coalitions capacitaires. Le 18 janvier dernier, la France a abrité une réunion importante de la coalition artillerie - que nous co-présidons avec les États-Unis d’Amérique - et qui a permis de mobiliser de nombreux pays pour coordonner les efforts de production, de livraison, de dons de tout ce qui touche justement l’artillerie et sa présence en Ukraine. Ces efforts doivent en effet aller de pair avec le renforcement de la base industrielle et technologique de défense européenne. C’est la raison pour laquelle nous devons assumer une préférence européenne, que ce soit dans la facilité européenne de paix transformée ou dans les futurs instruments. Nous aurons l’occasion de revenir là-dessus lors du prochain Conseil européen. Nous devrons trouver les moyens financiers et budgétaires de garantir ce soutien.
Nous avons franchi une étape importante en décidant de séparer les intérêts des actifs russes immobilisés. La deuxième étape sera maintenant de décider la manière d’utiliser ces intérêts et leur affectation et, là aussi, nous aurons l’occasion d’y revenir.
Ce Conseil a permis également un échange sur la situation au Proche-Orient. Il est aujourd’hui plus que jamais indispensable d’avancer sur les volets humanitaire, sécuritaire et politique de la crise. Dans ce moment critique, l’objectif de la France est d’accélérer le cessez-le-feu à Gaza, d’obtenir la libération de tous les otages et de prévenir une dangereuse escalade régionale. C’est le sens des efforts que nous déployons aujourd’hui, auprès de tous nos partenaires, en particulier au Moyen-Orient, et je considère que c’est aussi ce qui doit nourrir une véritable offre européenne de paix et de stabilité pour tous dans la région. C’est également le sens de l’initiative européenne que nous sommes en train de finaliser en mer Rouge.
Enfin, ce Conseil a été l’occasion d’un échange approfondi sur la situation agricole européenne. J’ai pu également avoir un échange avec la Présidente de la Commission européenne, aujourd’hui, comme je l’avais eu ces derniers jours et depuis plusieurs semaines. Nous vivons en effet une crise agricole en Europe et ce depuis de nombreux mois. Après les mouvements importants aux Pays-Bas, en Allemagne, maintenant en Belgique, Roumanie, Pologne, France, nous voyons partout en Europe des mouvements de contestation importants monter. Ceci arrive dans un contexte, pour ce qui est de la France, sur lequel je voulais revenir après que le Gouvernement a pu s’exprimer et que les principaux responsables syndicaux ont demandé la levée des barrages qui avaient été organisés.
Nous avons beaucoup fait ces dernières années, en particulier depuis 6 ans, pour notre agriculture en Europe et en France. D’abord en défendant une politique agricole commune qui - je vous le rappelle - il y a quelques années n’était pas acquise. Tout le monde la voyait à la baisse, tout le monde. Tout le monde pensait que la conséquence à la fois du Brexit et du contexte ferait baisser les montants de la PAC. Nous nous sommes battus, nous les avons maintenus. Ça représente environ 9 milliards d’euros par an.
À côté de cela, nous avons, dès 2017, lancé à marche forcée un travail très approfondi des États généraux de l’alimentation, deux lois successives - j’y reviendrai - des mécanismes qui étaient attendus depuis des décennies par nos agriculteurs - comme l’assurance récolte, pour faire face justement aux grands aléas climatiques - des plans de soutien de plusieurs filières - certains d’ailleurs encore reconfirmés ou pris à nouveau, qu’il s’agisse de la viticulture, de l’élevage ou d’autres. Nous avons profondément modifié nos équilibres. Sans cela, il est sûr que la situation serait beaucoup plus grave.
Néanmoins, nous ne devons pas sous-estimer que l’accélération que notre époque vit, la grande déstabilisation géopolitique, la guerre suite à l’agression russe en Ukraine et évidemment la pandémie de Covid ont conduit à des perturbations massives qui touchent très profondément le modèle agricole européen. Et c’est à cela que nous sommes confrontés. Les temps changent, nous vivons une révolution collective. Il faut faire face aux changements climatiques, à la guerre en Europe, aux déstabilisations géopolitiques. Et donc nous devons aussi profondément changer les règles et aller plus loin que ce que nous avons su faire.
Alors, que veulent nos agriculteurs ? Ils veulent vivre dignement de leur travail et ils ont raison. C’est plus que légitime. C’est tout le sens de cette PAC par les mesures que nous avons prises - je l’ai dit et confirmé en mon temps - ces 9 milliards d’euros par an, qui surtout est payée beaucoup plus vite que là aussi il y a quelques années. Je me souviens de la dernière PAC, j’étais récemment élu Président, il y avait des années de retard dans les paiements. On ne retrouve plus cette situation. C’est aussi le sens de Egalim 1 et Egalim 2 et de ce que le Gouvernement a annoncé ces derniers jours et en particulier ces dernières heures : permettre de défendre le revenu des agriculteurs et que, précisément, la rémunération juste de leur travail descende dans la cour de ferme. La baisse des charges - avec ce qu’on a fait sur TODE, qui va être confirmée pour les années à venir - les soutiens de filières - l’élevage, la viticulture, etc. - les décisions qui ont été prises sur le GNR, l’eau et d’autres éléments de charge ; c’est tout ce que nous avons su faire aussi filière par filière et nous allons continuer ce travail pour améliorer les choses. Et s’il faut modifier la loi à nouveau pour améliorer les contrats tripartites entre les producteurs, les transformateurs et les distributeurs, nous le ferons.
Ensuite, nous devons intensifier les contrôles. Beaucoup de contrôles ont été pris et les équipes ont été renforcées. Nous serons intraitables avec les plus gros industriels et en particulier, aussi, les plus gros distributeurs qui ne jouent pas le jeu de la loi. Et le Gouvernement renforcera également le bon contrôle des engagements en matière de restauration collective.
Maintenant, pour aller plus loin, au-delà des mesures d’amélioration nationales, il y a très clairement un combat européen à mener sur ce sujet. C’est ce que j’ai demandé à la Présidente de la Commission, maintenant, de travailler dans la revue stratégique qui vient d’être lancée, c’est de mettre en place un Egalim européen : c’est-à-dire de s’assurer au niveau de l’Europe qu’il n’y a pas un contournement, justement, de ce que nous avons fait au niveau français - qui en a inspiré plusieurs autres - par ces grandes centrales d’achats européennes. Or, ce que nous avons vu s’organiser ces dernières années, c’est certains distributeurs qui se sont organisés au niveau européen par des centrales d’achats et qui, avec ces dernières, cherchent à contourner la loi française. Au fond, il faut une Europe plus forte, plus concrète pour protéger le revenu de nos agriculteurs ; c’est maintenant là que se joue une partie de ce nouveau combat.
Que veulent nos agriculteurs ? Ils veulent pouvoir produire une alimentation de qualité. Nous avons en France une des meilleures d’Europe, mais en Europe, l’une des meilleures du monde. Œuvrer à notre souveraineté agricole, que nous défendons toutes ces dernières années, que nous avons encore renforcé, en particulier dans la filière protéines.
Et ils veulent pouvoir le faire avec aussi une vie plus simple, c’est-à-dire avoir plus de temps à dédier un peu à leur famille, mais aussi faire leur travail de manière plus apaisée. Pour ça, réduction drastique de la paperasse et de la complexité. C’est le chantier qui a été lancé avec le Gouvernement ; une dizaine de chantiers qui maintenant sera déclinée dans chaque préfecture pour permettre de simplifier les règles, limiter la paperasse et les complexités. C’est la visibilité qu’on donne sur le coût du travail et d’autres points ; c’est l’accélération des délais - il faut le reconnaître, nous avons été souvent trop lents. Les décisions sont bonnes mais, qu’il s’agisse d’accompagner des agriculteurs qui sont confrontés à une épizootie ou qui sont confrontés à une tempête ou un ouragan, les délais de mise en oeuvre sont trop lents et des mesures pour accompagner nos exploitants, sur MHE ou Ciarán ou autres, sont aujourd’hui en cours d’accélération par le Gouvernement.
C’est ce que nous souhaitons faire, aussi, par une politique résolue, que nous préparons depuis 18 mois, d’aide à la transmission et l’installation pour les jeunes agriculteurs, ce qui est un point clé pour produire justement davantage. Là aussi, ce combat doit être mené au niveau européen. C’est pourquoi nous avons d’abord obtenu, hier, une dérogation sur les 4% de jachère. Vous le savez peut-être, ça faisait partie de ce qu’on appelle "les éco-conditionnalités". Dans la PAC qui avait été décidée, il y avait la nécessité d’avoir 4% des surfaces qui étaient mises en jachère. Nous avions obtenu l’année dernière une dérogation. Nous avons réussi à en obtenir à nouveau cette année, ce qui permet à des cultures de soja, de luzerne, de fève, etc., de pouvoir être faites sur ces surfaces au lieu d’être laissées en jachère. C’est important pour nos exploitants et c’était demandé par ces derniers.
Au-delà de cela, nous souhaitons que les objectifs que nous nous étions donnés, en particulier dans Farm to Fork, soient revus à l’aune d’un objectif de souveraineté. Et au fond, nous devons prendre en compte la situation géopolitique, la situation de notre continent et remettre au cœur des objectifs européens notre souveraineté alimentaire. Pouvoir trouver des flexibilités sur les ratios prairies pour les adapter à la réalité du terrain et permettre d’avoir toutes les souplesses. Et à chaque fois que des règles trop complexes sont en cours de décision au niveau européen, pouvoir les adapter à l’aune d’un objectif de souveraineté alimentaire qui doit être intégré au coeur de notre stratégie. C’est ce que j’ai demandé à la Présidente de la Commission européenne dans le cadre de la revue stratégique qu’elle vient de lancer, qui commence à marche forcée et qui aura à prendre des premières décisions dans quelques semaines. En tout cas, nous veillerons, de manière très scrupuleuse, à ce que nos agriculteurs puissent continuer de produire et assumer que la production - et davantage de production - est une nécessité dans le monde où nous vivons.
Enfin, nos agriculteurs - et à juste titre - veulent que les règles soient les mêmes pour tous et je dirais que c’est une forme de bon sens et nous avons toujours été à leurs côtés pour cela. C’est un engagement que j’avais pris dès 2017 : pas de surtransposition. Nous avons d’ailleurs eu l’occasion de corriger des surtranspositions qui existaient. La surtransposition, c’est quoi ? C’est quand nous, Français, on a tendance à prendre des règles qui sont encore plus dures que ce qu’on décide au niveau européen. Ça avait été fait par le passé, nous n’en avons plus pris par voie législative depuis 2017. On en a même corrigé. Vous vous souvenez peut-être du fameux débat sur les néonicotinoïdes ; nous allons poursuivre ce travail ; il y a encore des points qui sont à travailler, à améliorer. Nous souhaitons aussi que quand des décisions sont prises par l’Agence française, elles soient coordonnées au niveau européen et c’est là où il peut y avoir des différences qui existent et que nous allons donc corriger. Et donc, sur tous les restes de surtransposition, ou les décisions où les agences françaises vont plus vite que la machine européenne, là-dessus - c’est le chantier qui a été lancé par le Gouvernement - nous adapterons les choses pour que la France, en quelque sorte, aille toujours au rythme européen et pas plus vite.
À côté de ça, j’ai demandé aussi au Gouvernement qu’on soit plus efficace dans les dérogations. Parfois, il est prévu, même dans les textes européens, qu’on puisse, sur tel ou tel produit, pendant telle ou telle saison, déroger - les producteurs de cerises le savent, ô combien. Il faut qu’on puisse le faire vite quand c’est nécessaire, et donc déconcentrer la décision au niveau des préfets.
Mais là aussi, on a besoin d’une Europe plus claire, au-delà de ce que nous, on va améliorer au niveau français et donc j’ai demandé à la Présidente plusieurs choses. D’abord, qu’il y ait des contrôles homogènes au niveau européen - et ça fait 5 ans que la France se bat sur ce sujet. Qu’est-ce que ça veut dire, de manière très simple ? Quand on a une règle européenne, qui est transposée de la même manière partout entre nos agriculteurs, il faut qu’elle soit contrôlée de la même manière dans tous les pays. C’est pourquoi nous demandons la mise en place d’une force européenne de contrôle sanitaire et agricole, force européenne qui puisse éviter justement la concurrence déloyale qui peut exister au sein même des pays parce qu’il y a trop de différences entre la manière dont les textes sont appliqués. Ceci n’existe pas aujourd’hui. C’est renvoyé à des différences entre pays, ce qui n’est pas satisfaisant.
Et puis l’autre point, c’est que les règles doivent être les mêmes à l’intérieur et à l’extérieur, si je puis dire. Quand on impose des règles de production à nos agriculteurs, ils peuvent les comprendre si c’est pour le bien-être de la population. Et on leur a demandé beaucoup d’efforts ; c’est la profession sans doute qui a fait le plus d’efforts et porté le plus de transformations ces dernières années et ces dernières décennies. Mais ce qui est incompréhensible, et ce que moi-même je ne sais pas expliquer, c’est lorsque nous imposons des règles pour ce qu’on produit en Europe et qu’on laisse importer des produits qui ne respectent pas ces mêmes règles et qui viennent hors d’Europe. C’est ce qu’on appelle les clauses miroirs. La règle qui vaut à l’intérieur pour la production doit valoir à l’extérieur quand on facilite les importations, c’est simple, c’est de bon sens, mais on ne le fait pas assez. C’est pour cette raison même qu’aujourd’hui, dans l’état des textes du Mercosur, la France s’oppose - et continuera de s’opposer - à cet accord de libre-échange avec la région Mercosur. Je l’ai dit encore très clairement au Président Lula il y a quelques semaines ; je l’ai dit à tous mes homologues ; je l’ai redit là et je me félicite que les discussions sur la base du texte, qui a été justement soumis, aient bien été suspendues, comme nous le demandions et qu’elles n’ont pas été conclues à la va vite comme certains menaçaient de le faire. Pourquoi ? Parce qu’on demande simplement que les règles environnementales et sanitaires qu’on impose à nos agriculteurs et à plusieurs autres professions soient les mêmes du côté, justement, des pays à qui on est en train d’ouvrir nos portes, sinon, ce n’est pas juste. La France maintiendra cette position parce que c’est une position de cohérence, de clarté, de solidité.
Ensuite, ce qu’on a demandé aussi à la Commission européenne - et ce sur quoi on va continuer de se battre, c’est que lorsqu’on prend de telles décisions, elles soient clairement mises en œuvre. Je vais prendre un exemple très simple et très clair : nous avons interdit, nous, de mettre des antibiotiques de croissance pour nos poulets. Pendant des décennies, on faisait ça. Mauvaise pratique ; il y avait des risques sanitaires. Nous l’avons interdit pour tous les producteurs européens. Nous avons - ça a été une initiative française, on n’a pas attendu ce qui est en train de se passer là - il y a maintenant près de deux ans, fait prendre un texte européen qui est une vraie clause miroir, en disant : tout ce qu’on importe doit aussi interdire l’utilisation de ces antibiotiques de croissance. Simplement, aujourd’hui, on ne le contrôle pas. Et donc, nous avons demandé que cette force sanitaire et agricole européenne puisse être mise en place au plus vite. Et surtout que les clauses miroirs qu’on prend, eh bien, elles soient contrôlées. C’est un combat qui est essentiel pour nos agriculteurs. Il est essentiel pour la France. C’est un combat de cohérence, c’est un combat d’honnêteté vis-à-vis d’eux. C’est un combat de souveraineté.
Comment appeler à la souveraineté alimentaire européenne ? On se bat depuis 6 ans pour elle. J’ai fait des discours au Salon de l’agriculture dès 2018 pour cette souveraineté alimentaire européenne. Si on impose des règles à nos agriculteurs et que soit on n’impose pas les mêmes aux produits qu’on fait rentrer, soit on ne les contrôle pas, ce n’est pas sérieux. Et donc, nous allons continuer de nous battre pour que quand une règle est imposée à l’intérieur, elle soit imposée à l’extérieur et pour que les contrôles soient au rendez-vous.
Ensuite, je disais, nos agriculteurs demandent que les règles soient les mêmes pour tout le monde, ce qui évidemment conduit à examiner de près la situation des imports agricoles venant d’Ukraine - débat qui a été au cœur de beaucoup de discussions, dans beaucoup de pays européens. Nous avons ainsi obtenu qu’on mette en place des règles plus strictes pour éviter les abus très clairs et les déstabilisations qu’on a vus ces derniers mois. On a ainsi obtenu que pour les céréales, il y ait un mécanisme de sauvegarde renforcé en cas de perturbation du marché, ce qui permettrait des mesures d’intervention si les céréales venant d’Ukraine, qui sont mises sur le marché européen, viennent à déstabiliser de manière trop importante nos cours, les prix, ou créent une concurrence qui serait déloyale, avec différents mécanismes qui peuvent être de bloquer, d’intervenir sur les prix ou autres. Pour ce qui est des œufs, des poulets, du sucre, nous avons obtenu des mécanismes de protection en reprenant l’historique des volumes 2022 et 2023, et dont le premier semestre 2022, avec des chiffres qui étaient plus historiques et qui, au-delà de volumes ainsi définis, nous permettent de rétablir des droits de douanes. Au fond, je vais être simple : oui, pour aider l’Ukraine dans un contexte de guerre, non pour créer une situation de concurrence déloyale qui profite à quelques milliardaires, ou à quelques grands industriels, qui ne respectent pas nos règles. Là aussi, c’est du bon sens. Eh bien, c’est ce qu’on a obtenu en changeant ainsi ces règles.
Vous l’avez compris, ces derniers jours, ces dernières heures, nous avons obtenu des avancées substantielles, qu’il s’agisse de la question des jachères, de l’Ukraine ou du Mercosur. Plus largement, nous avons obtenu de pouvoir lancer un travail de révision en profondeur de la logique et de l’approche européenne - et je remercie la Présidente de la Commission qui a entendu cette demande, qui a lancé cet exercice de dialogue stratégique. Il va permettre, dès la fin du mois de février, de prendre des mesures de simplification au niveau européen, comme nous sommes en train de le faire au niveau français. Mais il va surtout nous permettre d’intégrer, beaucoup mieux qu’on ne l’avait fait, dans une PAC qui avait été pensée avant ce nouveau contexte géopolitique, d’intégrer le changement de logiciel dans lequel nous vivons. La guerre est là, le monde se transforme et donc nous devons avoir une politique agricole plus simple qui prenne en compte davantage la nécessité de produire plus, qui, évidemment, intègre nos objectifs environnementaux, mais qui le fait en préservant une concurrence loyale, en préservant le revenu des agriculteurs et en préservant notre souveraineté alimentaire. C’est ça le changement de logique que nous voulons porter au niveau européen, que nous avons commencé ces dernières heures à pouvoir lancer et enclencher et sur lequel nous ne lâcherons rien.
Nous nous sommes battus pour obtenir ces premiers résultats. Nous continuerons de le faire pour avoir une agriculture européenne et française plus forte, plus souveraine et continuer à avoir l’une des agricultures qui fournit l’alimentation de qualité aux meilleurs standards mondiaux. Parce que nous devons être fiers de l’alimentation française européenne, c’est l’une des meilleures du monde. Donc on doit continuer à se battre pour elle et, ce faisant, à bâtir notre nouveau modèle agricole, par de l’investissement, par des changements, mais aussi par du bon sens, de la simplicité et de la volonté. Le combat va donc continuer en ce sens et nous aurons l’occasion dans les prochaines semaines et les prochains mois de continuer d’œuvrer pour obtenir des résultats concrets pour nos agriculteurs.
Je vais maintenant répondre à toutes vos questions."